Vos . papiers . d'identité

Ta . réponse . au . topic . de . la . Donna

Régulièrement, au rythme de la musique de la marche nuptiale, son cœur battait contre sa cage thoracique, petit organe stressé et angoissé. Quelque chose clochait, elle le sentait au plus profond d'elle-même, et, alors que chaque fibre de son corps lui indiquait que c'était trop tard ; les invités faisaient tous comme si de rien n'était. Comme si le retard de la mariée était prévu, qu'elle n'allait pas tarder à franchir la lourde porte en bois de l'église. Mais Elisea n'y croyait pas, n'y croyait plus. Comment pouvaient-ils espérer à ce point ? Quelques minutes, d'accord, mais là, ça faisait trop. Elle était partie, avait prit peur à l'idée de s'engager pour la vie avec une seule personne, se réveiller à ses côtés tous les matins, voir ses vêtements traîner continuellement dans la maison, avait eu peur à l'idée de ne coucher qu'avec un seul homme pendant le restant de ses jours.
Une voix retentit dans son oreille, la faisant sursauter. « C'est pas trop tôt... Un peu plus et j'allais me commander une pizza pour patienter... » . Essayant de retenir les coins de ses lèvres de se relever dans un sourire, elle resserra la pression de sa main sur celle du jeune homme, l'incitant à se taire. Même si l'attente se faisait longue, le moment ne se prêtait pas vraiment aux plaisanteries. « J'aurais partagé, bien sûre ! Roooh ! » . Là, ses lèvres se relevèrent franchement, et elle se mordit la lèvre presque jusqu'au sang.
Elle sentait qu'il s'était passé quelque chose. C'était même évident, la mariée n'arrivait pas avec tant de retard, d'ordinaire. C'était peut-être quelque chose de grave. Alors qu'elle essaya de chasser ces pensées néfastes et complètement ridicule, la porte en bois s'ouvrit enfin. Mais la mariée tant attendue et espérée n'apparut pas sur son seuil.

C'était un bouquet. L'assortiment de fleurs si bien arrangé que la jeune mariée devait porter jusqu'à l'autel, avant de le lancer parmi la foule de jeunes célibataires qui se battraient pour l'obtenir, et dont Eli' ne faisait jamais partie. De son banc vers l'avant de la salle, la brunette ne distingua que la forme familière de ce bouquet, mais en aucun cas les détails. Okay, c'était simplement une blague de mauvais goût, ou alors une sorte de rituel familial, le premier qui se précipitait sur le bouquet avait gagné. Mais avant qu'elle ne puisse pousser ses réflexions plus loin, la mère de la mariée poussa un cri horrifié, qui lui perça les tympans. Ce n'était qu'un bouquet, il fallait se calmer. Cependant, au fond d'elle, elle savait qu'il y avait quelque chose de plus, auquel elle n'avait pas fait attention, et qui avait son importance. Se redressant, et suivant par la même occasion le regard de la foule de curieux qui s'approchaient de la porte, elle se passa nerveusement la main dans les cheveux. Elle finit par se lever franchement, ne lâchant toujours pas la main d'Andrea ; et tandis que la panique s'installait au sein de l'église, elle vit enfin le bouquet. Sa bouche s'entrouvrit, mais aucun son n'en sortit. La respiration coupée, le cœur battant à toute allure, elle constata l'ampleur des dégâts. Ses yeux ne pouvaient quitter les tâches de sang qui le maculaient. La boule au ventre, elle quitta ce spectacle des yeux bien rapidement. L'alphabet à l'envers, vite, comme à chaque fois qu'elle paniquait. Z, Y, X. W, V, U.
La mariée s'était enfuie. Avait déposé le bouquet devant la porte, symbole de son abandon, de sa faiblesse. Non, c'était ridicule. Elle avait elle-même maculé le bouquet de ketchup, afin de faire une petite blague. Le jour de son mariage ? Son cerveau avait beau tourner à plein régime, aucune explication ne lui semblait plausible. Et si Stefania avait été enlevée, torturée, violée, dévorée par des cannibales ? Un scénario bien macabre pour un jour de mariage, et pourtant, les idées les plus tordues hantaient son esprit, allant du réaliste au tragique, en passant par la complète paranoïa. Ce mystère à résoudre semblait palpitant. Cela dit, qu'un événement pareil se passe le jour du mariage était complètement désastreux.

Bien qu'elle n'entretienne pas des liens très proches avec le couple, Elisea s'était surtout pointée par curiosité. Et elle le regrettait fortement. Si, comme elle le pensait depuis des semaines maintenant, le jeune marié l'espionnait pour le compte de son père ? Dans ce cas, en la voyant dans l'assemblée, il ne manquerait pas d'en avertir Mr. Benedetti, qui s'empresserait de venir la chercher. Mais toutes les lettres qu'elle lui avait volées, tous les indices qu'elle avait essayé de récolter, lui prouvaient qu'il n'existait aucune communication entre son père et le jeune homme. A moins que... la paranoïa l'emportait peut-être sur la raison, parfois. Peu importe s'il cachait quelque chose, elle saurait le découvrir, et déjouer ses petits plans. Après tout, elle a les atouts nécessaires pour cela, et en est bien consciente.

Andrea se leva à son tour. « Viens ma puce... On rentre. » Complètement sonnée par ce qu'il venait de se passer, la jeune femme acquiesça et se laissa entraîner vers la sortie. La main de son petit ami la tira parmi la foule des curieux qui leur lançaient des regards assassins. Ce n'était pas de leur faute s'ils préféraient ne pas se mêler de ce qui, de toute évidence, ne les regardaient pas. Encore une cérémonie de mariage qui tournait en désastre. Elisea ne savait pas comment prendre les événements, et bien qu'intriguée par la situation, elle avait assez de problèmes compliqués avec elle-même sans qu'en plus, elle se mêle de ceux des autres. Il y avait déjà trop de mystères et de cachotteries par ici, alors une de plus ou de moins, finalement, ça ne changeait pas grand chose. Hélas, c'était sans doute la gravité et l'étrangeté de cet événement qui allait pourtant poursuivre la jeune femme jusqu'au plus profond de ses rêves pendant toute la nuit.

Et . derrière . l'écran . se . cache...